Chères adhérentes, chers adhérents, chers collègues,
Quand la musique est bonne… (Bonne, bonne, bonne)
Le mois dernier, la Lettre de la Fédération testait votre niveau mathématique. Ce mois-ci, votre hauteur de vue, dirons-nous. Loin de moi évidemment l’idée de hiérarchiser le principe de laïcité de la République, mais reconnaissons qu’en matière musicale, les religions rompent elles-mêmes avec ce principe d’égalité dès lors que les religions juive et musulmane ne prévoient pas expressément d’hommage musical au jour des obsèques, les chrétiens, eux, procédant autrement en s’autorisant une dernière symphonie, une chanson dans la tête. De fait, contrairement à l’idée d’évidence que la musique rapproche, il arrive qu’elle divise… du moins selon ce que vous étiez de votre vivant… et juste à ce moment de bascule qu’on appelle les funérailles. « Business is business », voilà dorénavant votre musique préférée tarifée à 5€ pile au moment où justement, vous ne serez pas dans les dispositions les plus favorables pour l’entendre, quand bien même votre position en cet instant précis pourrait le laisser croire au jour de vos obsèques. Vous étiez prévenus « hauteur de vue indispensable »
La Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique, la SACEM, vient donc de gagner son procès contre les pompes funèbres pour appliquer cette nouvelle dernière « extrême (p)onction » et forfaitaire de 5€ en inventant l’impôt « jusqu’à la fin de la mort ».
Le mieux est de décider de votre vivant quand bien même le souci d’alourdir la facture vous aura déjà quitté au moment de l’écoute. Bien sûr, il vous sera conseillé de ne pas trop miser sur la chanson improvisée de vos amis présents, style « chant libre » qui peut vite virer à la catastrophe sauf à ne souhaiter qu’on ne retienne que cela de vous. Vous voilà informés qu’il vous en coûtera 5€ si vous choisissez l’option « chantée par un professionnel »… Oui, même si c’est un requiem qui a été composé justement pour ces occasions. Oui, pareil pour la marche funèbre. Pour ce qui concerne votre morceau préféré de rap ou de métal, le jugement ne précise rien, mais la musique est un art universel.
Une redevance de fin de vie, comme un « dernier sacrement » lucratif, juste au moment où vous aviez prévu d’emporter votre morceau préféré et comble de cynique, le jour où vous n’avez pas de monnaie sur vous. Pour celles et ceux qui auraient prévu une playlist, pensez (ou pas) à qui va payer votre dernière facture.
Alors oui, la musique est bonne, bonne, bonne… mais payante jusque dans l’au-delà. Décidemment, personne ne fait de cadeau. On se demande souvent « Quelle planète allons-nous laisser à nos enfants ? ». Et si pour une fois, à la lecture de cet insignifiant détail certes, mais hautement révélateur de notre société, on se demandait : « Quels enfants allons-nous laisser à notre planète ? ».
Laurent TINTIGNAC – Secrétaire général de l’UNSA-Défense